On peut le dénoncer ou le déplorer, mais le constat est sans appel. La valeur esthétique d’un artiste est plus que jamais liée à sa valeur financière. Plus un artiste vend d’œuvres, plus il sera reconnu.
Les codes de la scène artistique contemporaine sont devenus de plus en plus marchands au fil des années. Une accélération de la monétisation de l’art qui est notamment liée à la place plus grande prise par les grands collectionneurs privés au détriment des institutionnels.
En devenant collectionneurs, les financiers et les gestionnaires de hedge funds (fonds spéculatifs) ont introduit de nouvelles règles. Ils achètent de l’art comme un investissement parmi d’autres, recherchant en priorité les valeurs sûres leur «garantissant» une plus-value. Du coup, ils tendent à stabiliser, voire à figer, les positions occupées par les artistes. Un des éléments pour minimiser les risques de leur investissement est la nationalité, et certaines «fonctionnent» mieux que d’autres à ce petit jeu.
Il est évidemment absurde de raisonner seulement en termes de nationalité dans le domaine de l’art, de vouloir cloisonner l’artiste dans un périmètre de frontières. C’était vrai hier, ça l’est encore plus aujourd’hui à l’heure de la mondialisation. L’artiste a un passeport, mais son travail, ses inspirations proviennent d’univers multiples où se mêlent formation, lieu où il travaille, vit, confrontations avec ses pairs…
La mondialisation a bouleversé le marché de l’art, que ce soit les galeries, qui désormais, pour continuer à exister, multiplient leurs annexes internationales, ou encore les grandes maisons d’enchères, qui ont développé des bureaux et des ventes spécifiques aux quatre coins de la planète. L’effacement des frontières est même devenu une réalité pour les musées, qui conçoivent les grandes expositions en collaborations entre plusieurs institutions internationales.
Mais la question de la nationalité reste tout de même pertinente. Elle est le reflet du dynamisme d’une jeunesse et d’une culture, et plus encore un levier pour promouvoir les jeunes artistes sur la scène internationale.
Ainsi, l’explosion britannique dans l’art contemporain au tout début des années 1990 est sans aucun doute dû au soutien et à la volonté d’un «grand patron», Charles Saatchi, qui a permis à une génération d’artistes britanniques d’éclater sur le devant de la scène artistique, notamment au sein des « Young British Artists », en appuyant par diverses actions, comme l’exposition massive des artistes nationaux, et en facilitant leur promotion internationale.
Un développement qu’est venu renforcer la place de Londres, qui a su garder sa toute première importance, notamment pour les ventes aux enchères de l’art contemporain. Enfin, un événement a su «capitaliser» cette place centrale, la foire de Frieze qui en à peine une dizaine d’années d’existence, a su se hisser dans le trio des foires les plus importantes au monde, tandis que la Tate Modern, musée consacré à l’art contemporain depuis son ouverture en 2000, a su drainer plus de 40 millions de visiteurs
En Europe, l’autre pays qui a su promouvoir l’art contemporain est l’Allemagne, avec une démarche et des atouts bien différents. Un curieux mélange d’initiatives publiques et privées, comme l’ABC (Art Berlin Contemporain) une manifestation pilotée par l’Administration du Sénat de Berlin pour l’économie, la technologie et la recherche, la chancellerie des affaires culturelles de la ville et la Deutsche Bank. Ou comme la série d’expositions organisées à Hanovre en 2012, « Made in Germany », qui montrait un instantané de la scène artistique contemporaine en Allemagne.
Surtout, le pays bénéficie de l’aura particulière de Berlin, qui concentre près de 20.000 artistes et 450 galeries depuis une quinzaine d’années dans les quartiers de Mitte, Kreuzberg, ou plus récemment Potsdamer Straße. Enfin, il faut souligner la place particulière de la prestigieuse Documenta, une exposition internationale qui se tient tous les cinq ans pour une durée de 100 jours à Cassel, depuis 1955.
Restent en Europe deux autres villes qui sont des hauts lieux de convergence des amateurs d’art contemporain: Venise, avec sa biennale incontournable depuis sa création à la fin du XIXe siècle, et Bâle, avec sa foire qui transforme chaque année la ville suisse durant un long week-end de juin.
Mais un pays concentre tous les atouts: les États Unis, et cela depuis 1945. Si au début des années 1950, la France était encore un lieu attractif pour les artistes, les galeries et le marché, au tournant des années 1960, New York a pris le relais.
La ville a alors tout raflé: marché, galeries et artistes, américains bien sûr, mais pas seulement. Les grands mouvements de l’art contemporain qui ont rythmé l’après-guerre sont nés de l’autre côté de l’Atlantique, que ce soit l’art abstrait, l’art minimaliste ou encore le pop art. À présent, et même si les artistes américains ne sont plus seuls à tenir la place, le pays garde son pouvoir d’attraction auprès des jeunes artistes.
C’est simple, si un artiste veut obtenir une reconnaissance internationale, et s’il veut parvenir au premier plan, il travaillera à un moment ou un autre aux États-Unis: qu’il soit chinois comme Ai Weiwei, brésilien comme Vik Muniz ou français tel Pierre Huyghe, qui tous ont eu ou ont encore un atelier dans la cité.
La ville offre une concentration incroyable de près de 1.000 galeries disséminées dans plusieurs quartiers –Midtown, Chelsea, Lower East Side, Williamsburg ou Bushwick. Ces ventes aux enchères servent de référence au marché mondial.
La force des États-Unis est d’être resté un carrefour. Ainsi, la foire Art Basel de Miami, qui se tient en décembre, après une première année un peu difficile en 2001, a très vite su saisir l’attention d’un vaste public dépassant les habituels amateurs d’art, et attiré largement toute l’Amérique latine. Sur la côte Ouest, depuis quelques années, le renouveau de la scène californienne anime Los Angeles, où une nouvelle concentration d’artistes, de jeunes collectionneurs et de galeries revitalisent la ville et en fait une porte ouverte vers l’Asie.
Et avec cet article, nous vous souhaitons de très bonnes et artistiques vacances…et à Septembre!
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