
Georges-Philippe Vallois, le président du Comité professionnel des galeries d’art, est sur tous les fronts en ce début d’année, tant la situation est préoccupante pour nombre de ses adhérents. « Le métier de galeriste est pris en étau, entre les foires d’art et les maisons de vente, toutes deux médiatiques et spectaculaires. Les collectionneurs internationaux, les commissaires d’expositions, les critiques d’art, ont de moins en moins de temps. Alors ils cèdent à la facilité et fréquentent les lieux ou événements qui concentrent l’offre« , déplore-t-il dans Les Échos du 10 Février de cette année.
Pour les galeries petites ou moyennes, il est de plus en plus difficile d’être visibles. «« Les galeries du premier marché, celles qui découvrent les artistes, ont absolument besoin d’être admises et ainsi ‘labellisées’, par les grandes foires, sinon elles se trouvent reléguées en deuxième division. Quant aux galeries du second marché, elles sont de plus en plus pénalisées par la concurrence des maisons de vente aux enchères, très offensives sur les transactions de gré à gré« , poursuit Mr. Vallois. Plus grave, les grands musées, à la diète, deviennent plus dépendants de fonds privés pour organiser leurs expositions et, là encore, le jeu n’est pas équitable. « Depuis que le château de Versailles montre de l’art contemporain, tous les artistes choisis sont défendus par de grosses galeries, à même d’aider l’institution en finançant certaines pièces. Aujourd’hui, pour exposer dans de tels lieux prescripteurs, un artiste doit être soutenu par une galerie qui a les moyens de produire ses œuvres. »
Cette faiblesse des galeries françaises complique par ailleurs l’accès des artistes hexagonaux à l’international, ce qui, à terme, met en péril toute la filière de l’art. Et c’est pourquoi le Comité attend une prise de conscience des acteurs publics. « Du côté des musées, on manque cruellement d’expositions consacrées à la scène française, que ce soit au Centre Pompidou, au musée d’Art moderne de la Ville de Paris et même au Palais de Tokyo. Cela est particulièrement vrai lors d’événements majeurs comme la Fiac, foire d’art qui rassemble pourtant le microcosme mondial de l’art. Cela nuit au renouvellement et au rayonnement de la scène française. » Et c’est aussi à Georges-Philippe Vallois de s’étonner : « On nous rétorque qu’avoir les yeux rivés sur les artistes français ; c’est dépassé dans un monde globalisé. Mais alors pourquoi les Américains, Allemands, Anglais, Mexicains, Chinois, font-ils la part belle à leurs talents nationaux ? »
Le gouvernement n’a pas pris la mesure des enjeux, estime ce marchand, qui regrette de n’avoir pu rencontrer encore la ministre de la Culture Fleur Pellerin. « Nous réclamons une politique plus volontaire, la scène française doit être une priorité. Aujourd’hui, le Centre Pompidou est très sollicité dans le monde pour des prêts, parce que la France a rayonné pendant des décennies ; si un musée veut obtenir une œuvre de Matisse, par exemple, Beaubourg est incontournable. Mais demain ? » observe ce professionnel. Georges-Philippe Vallois se montre particulièrement inquiet pour les artistes nationaux en milieu de carrière qui ont besoin du relais des musées ou des centres d’art – eux aussi au régime sec – pour franchir une autre étape. En attendant des changements d’attitude de la part des institutions publiques, le Comité est entré au conseil d’administration de l’Adiaf : ce club qui compte 350 collectionneurs privés. Il décerne chaque année le prix Marcel Duchamp à un artiste résidant en France, lequel est exposé ensuite au Centre Pompidou. Pour aider les galeries à financer des œuvres d’artiste, le Comité a négocié avec le Centre national des arts plastiques la création d’un fonds d’avances remboursables aux galeries d’art. Avec la banque culturelle Ifcic, des aides au développement des galeries ont été également instituées. Objectif : permettre à celles qui n’offrent pas de garantie suffisante aux banques (non-possession des murs, absence de stock) d’accéder au crédit. Une étude pour mieux cerner le poids du secteur va enfin être lancée. Le Comité pourrait également être ouvert à quelques antiquaires pour renforcer l’influence de cette association.
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